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"Je suis là pour être puni": l'abbé de Rostand, jugé pour agressions sexuelles sur mineurs, face à ses victimes

Le tribunal de Gap.

Le tribunal de Gap. - BFM DICI

L’abbé de Rostand est accusé d’atteintes sexuelles portées sur des mineurs en France, en Suisse et en Espagne entre 2002 et 2018. À la barre, les victimes ont pris la parole.

C’est dans une ambiance lourde que s’est déroulée l’audience ce jeudi après-midi au tribunal de Gap. Sur les bancs des parties civiles, trois jeunes hommes font face à leur agresseur, l’abbé de Rostand. Âgé de 58 ans, il est assis sur le banc, les bras croisés, et regarde vers le sol à l’écoute des propos, pensif.

Une fois à la barre, il reconnaît les faits: "Je pensais que c’était des tentations que l’on pouvait repousser. Je demande pardon à mes victimes."

"J’avais un dégoût pour la sexualité"

Tour à tour, elles prennent la parole. Adrien, Tristan et Gauthier font une déclaration à la barre. Le dernier, Pierre, termine les déclarations à distance. Les passages à l’acte reprochés: une main glissée sous le maillot de bain, des massages du bas du ventre jusqu’au sexe durant plusieurs minutes ou pris dans les mains pour soi-disant discerner la présence de tiques en tant qu’infirmier ou encore l'observation de jeunes garçons sous la douche.

Des déclarations, il ressort un sentiment de dégoût, de la colère et une envie de mettre l’accusé hors d’état de nuire.                                

"J’étais pétrifié". "J’ai une vision déréglée de la sexualité". "Aujourd’hui, j’ai beaucoup de colère que j’ai du mal à canaliser." "J’avais un dégout pour la sexualité. J’ai dû rompre mes fiançailles… J’ai décidé d’avancer", peut-on entendre dans la salle d’audience.

Une autorité qu’ils devaient autrefois respecter de par sa posture au sein de la fraternité et en tant qu’ami proche des familles.

L'abbé s'était dénoncé auprès de sa hiérarchie

De son côté, l’abbé de Rostand a davantage de difficultés à parler. Lorsqu’il s’agit de nommer les faits, les mots se font rares avec des balbutiements. À la question du Président de séance: "Mettre un thermomètre dans l’anus est-ce une pénétration?" Il reste silencieux. Puis, on continue à le questionner à la barre : "Aviez-vous conscience que c’étaient des actes illégaux?". Ce à quoi il répond: "Illégal non, mais immoral oui." 

À la déclaration de l’un des avocats des parties civiles: "Si la dénonciation avait eu lieu plus tôt, on aurait évité des victimes", il acquiesce, hoche la tête, le regard fixé vers le sol.

Il annonce même s’être dénoncé auprès de la Fraternité de Saint-Pie X en 1998 par lettre à ses supérieurs, dans laquelle il avait écrit ses difficultés avec les enfants. Puis en 2000 par oral, en 2006 et en 2013. Des faits qui ne seront dénoncés qu’en 2019. Depuis, il est suivi par un psychiatre.  

Au cours de l’audience, quatre années de suivi socio-judiciaire avec une injonction de soin, une indemnisation des parties civiles et du trésor public, une interdiction définitive d’exercer une activité avec des mineurs ainsi qu’une inscription au FIJAIS, le fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes, ont été requises contre l’abbé. Avec un risque de trois ans d’emprisonnement, dans le cas où il ne respecterait pas les années de suivi socio-judiciaire.

Avant l’annonce de la mise en délibéré le 6 juin prochain, la séance s’est terminée sur les paroles de l’abbé: "Je demande pardon aux victimes. Elles ne sont peut-être pas en mesure de l’entendre. Je regrette profondément ce que j’ai fait. Je suis là pour être puni."

Sandrine Baccaro